5/03/06 : The European Pub Rock Connection
Hello ! Je me nomme Walter Loo, je suis belge ou plutôt
flamand, mais à la différence de beaucoup de mes compatriotes je parle
français... Ce n'est pas pour ce petit détail qu'Henk Severijns me contacta
bien que cela fut fort utile par la suite. Non en réalité, je suis l'heureux possesseur
d'un van, ce qui me rend souvent indispensable pour un groupe de rock 'n' roll.
Il me faut rajouter qu'Henk est un type adorable, un peu réservé, et un
excellent guitariste. C'est aussi l'un des membres fondateurs de mon groupe préféré
les Shakedown
!
Il y a quelques semaines Henk est arrivé excité. Via le
web,
il avait été
contacté par un certain Greenbullet chanteur des
Shaggy Dogs, groupe fameux et
français. La connexion s'était aussitôt effectuée, car cet inconnu
revendiquait fièrement le style pub rock à la Dr
Feelgood, Inmates, et autres
Nine Bellow Zero. Cela tombait bien, les Shakedown sont fans de rock et de pubs...
Le deal proposé était le suivant : les belges organisaient une petite tournée
chez eux pour les français et ces derniers en faisaient autant pour les
belges.
Le premier jour :
Aussitôt dit aussitôt fait, le rendez vous est fixé pour le 10 février 2006
à dix-huit heures à Baarle-Nassau Hertog. Henk était un peu inquiet, vu
qu'ici personne ne sait vraiment si on est en Belgique ou en Hollande, et ses
explications ne devaient pas être évidentes pour des frenchies... Mais non, les
voila, et sans retard ! Autour d'un premier verre de bière, les présentations
sont vite faites. Ici tout le monde s'interrogeait sur la tête d'El
Profesor,
le batteur, dernier venu et encore peu présent sur le magnifique site du
groupe. En réalité c'est le seul chien hirsute de la bande... Tous le monde est rassuré, notre aventure européenne peut
commencer !
Première étape, le The Blue Jeans, à Ravel-Eel
en Belgique. On connaît bien la salle, c'est un véritable saloon avec paires
de tiags et cornes de bisons comme déco. Le patron est un authentique cow-boy
flamand, le
DJ est enfermé dans un décor de diligence, et la scène toute en bois fait
face à un alignement de tables pouvant accueillir 250 braillards prêts à
lyncher les groupes peu convaincants. Bref une
ambiance Country & Western qui n'effraie pas le moins du monde nos invités
français. Par contre, quand les Shakedown apparaissent et installent leurs gros
amplis Marshall, et le trois corps du bassiste et géant Mark Van De
Rakt, on
sent bien que les Shaggy Dogs se demandent si c'est bien raisonnable de laisser
jouer les belges en premiers... C'est le programme prévu et l'on si tient.
Rens
Hordijk le batteur allemand apparaît avec un splendide t-shirt des Inmates au
Plan : sauf que Greenbullet et El
Profesor, eux y étaient à ce fameux concert ! Rens, grand fan de pub rock et
personnage volubile un verre à la main, nous raconte
comment Peter Gunn le menaçait
physiquement quand il produisait le disque de son ancien
groupe, les Desoto... Bref tout le monde se sent en bonne compagnie, et quand les belges
attaquent leur set, les français sont au premier rang.
Ce soir là, les Shakedown sont tendus, et Rens passe plus
son temps à faire le
malin, qu'à frapper sa caisse claire. Comme d'hab, Whoopin' Willie Koyen sauve
l'affaire. Avec sa tronche de prolo, le chanteur batave y met tous son cœur,
qu'il balance un rock façon Jerry Lee ou un bon vieux
Stones. A mon goût
leur interprétation du fire down below du grand Bob
Seger, reste toujours la
bonne surprise de leurs gigs, et quand ils quittent la scène, les Shaggy Dogs
peuvent jouer face à un public bien chaud. Le pub rock des français fait aussitôt
son effet, et même les jeunes punks perdus dans ce club trouvent leur compte
quand le groupe balance un drinkin wine spodee o dee sur vitaminé. Leur énergie fait
plaisir à voir, et la six cordes façon mitraille à la Mick Green ravie le public
belge toujours fin connaisseur. Bien sûr le concert se termine par une jam
torride. Henk et Jacker croisent le fer et leurs deux jeux
de guitare diamétralement
opposés, font merveille. En fin de soirée, Willie nous fait bien marrer à tenter
de ranger ses harmonicas à quatre pattes sur la scène ; il faut dire qu'à cette
heure de la nuit, il n'est plus vraiment complément à jeun...
Le deuxième jour :
Visiblement la nuit fut courte pour les français, et quand je les retrouve le
lendemain matin, je m'amuse à les suivre errant dans cette ville, enclave belge
aux Pays-Bas où certains trottoirs sont hollandais et d'autres dépendant de la
couronne belge... Ainsi je leur raconte qu'il fut un temps où un gamin sur un vélo
sans lumière pouvait
narguer la police belge et se réfugier sur le trottoir
hollandais plus conciliant en matière de sécurité et bien évidement,
cette situation permettait aussi d'aller facilement s'approvisionner dans les
coffee-shops néerlandais voisins... Rapidement, je comprends qu'El Profesor n'a
pas fermé l'œil de la nuit, vu les ronflements de son voisin dont je tairai
le nom pour préserver l'amitié franco-belge... Cela ne les empêchent
nullement d'aller faire le plein de produits chocolatés locaux, puis de se
retrouver à table autour d'une bonne bière. Une petite sieste, et il est
l'heure de s'installer pour le concert du soir. Toma le bassiste nous explique
que pour eux c'est du grand luxe, vu qu'ils jouent dans le club de l'hôtel où
on les a installés. Pas de trajet, des loges à disposition, et la perspective
de se lâcher sans craindre de ne pas retrouver sa chambre. Le pub est particulièrement
cosy, style anglais avec une déco en bois à l'ancienne, et une vraie scène.
Les Shakedown sont là pour installer la sono, et le public répond présent à
cette affiche qui annonce au Grand Café Den Bonten Os, un
groupe de pub-rock uit Parijs
(Frankrijk)" !
Le premier set est aussitôt balancé avec les classiques du groupe et parmi mes
préférés un dead city ravageur, une compo des Shaggy sur un
texte de Terry L. Hale. Avant l'entracte Willie
monte rejoindre les français pour
quelques standards de Feelgood. Le batteur considérant que le groove
n'a pas été à son maximum, présente ses excuses à l'invité qui n'en revient
pas : qu'est ce que ça doit être quand le groupe est au top... le second
set nous en rapproche passablement, avec une énergie communicative qui sait
séduire le public féminin très présent au premier rang pour danser sans
retenue, ce qui bien sûr survolte les français. Le clou de la soirée est
l'intervention très rock 'n' roll de notre Little Bob national qui
vient
partager le micro avec Green Bullet pour un rock déchaîné.
Henk, à la guitare
et Willie, à l'harmo ne peuvent s'empêcher de les rejoindre
sur un route 66
apocalyptique face à un public qui ne veut plus les laisser s'échapper.
El Profesor se rappelle alors qu'un vieux couple lui avait demandé s'ils
allaient jouer tard dans la nuit ; il est plus de deux heures du matin, et
personne ne s'est plaint... Vers trois-quatre du mat, après moult bières à
gogo, les frenchies et les belges décident d'un commun accord qu'il est
temps de rentrer, mais les plus saouls ne sont pas forcement ceux qui n'ont qu'un étage à grimper pour se coucher...
Le troisième jour :
Après quelques heures d'un sommeil réparateur, il est temps de filer vers
Turnhout pour un concert à 15 heures au Wirwar. Ce pub a la caractéristique
de faire jouer les groupes adossés à une grande baie vitrée, comme certaines
filles à Amsterdam dans le but évident de faire rentrer les clients. Cette après
midi il n'y a pas foule mais selon Greenbullet, les gens présents
font
plus de bruit et montrent plus d'enthousiasme que bien des publics français.
Un cadre chaleureux, une jolie blonde comme serveuse, des amateurs de
rockin'blues, et cela suffit pour déchaîner les français. Deux heures de
concert, plusieurs rappels, plus un invité surprise boeuffant sur un I can
tell énergétique : résultat le chanteur des Shaggy Dogs
finit debout sur
le comptoir devant un public aux anges.
Pour nos amis, le compte à rebours débute. Il faut maintenant tout plier
pour rentrer le vite possible, car la neige tombe, et la traversée de la
Belgique s'annonce difficile. Avant de se quitter le rendez vous est pris.
Les 24 et le 25 mars prochains les Shakedown
seront à leur tour en tournée en
France. D'abord à Saint Folquin, puis au Pub de la
Terrasse à Étampes le fief
des Shaggy Dogs : un rendez vous à ne pas
manquer !
Je crois me souvenir que Jean Monnet père fondateur de l'Union Européenne a
dit "l'Europe se fera par des réalisations concrètes créant d'abord une
solidarité de fait". Eh bien les Shaggy Dogs, et les
Shakedown ont
simplement appliqué ce principe au nom de l'amitié et du pub rock.
Bravo et à bientôt !
Walter